mardi 4 décembre 2012

10 bonnes raisons ....de ne pas faire croire au Père Noël

D'ici quelques jours, nous rencontrerons, à chaque coin de rue, des bonshommes en rouge.
Les commerçants, la bibliothécaire, les "mamies du bus bienveillantes", la prof de danse, et tant d'autres encore anticipent déjà ce déferlement. Chaque déplacement est désormais ponctué d'une petite phrase choisie parmi : "Alors, il va t'apporter quoi le Père Noël ?", "Bientôt le Père Noël ? ", "Tu as été bien sage ? Le Père Noël va t'apporter des cadeaux ?" ou encore "Alors, tu lui as demandé quoi au Père Noël ?".
Au départ (mi-novembre !!!), je sentais se tourner vers moi le regard interrogateur de ma Pomme qui ne comprenait pas vraiment de quoi on lui parlait... Aussi je me sentais obligée de répondre à sa place, en éludant le problème : "Ohlala, il y a le temps ! 1 mois et demi à leur âge, c'est une éternité !"
Mais cette année, plus question de laisser les choses se tasser toutes seules, j'ai pris le taureau par les cornes.
Et j'ai expliqué à Pomme et Lys qui était le Père Noël.
Et que chez nous, on ne racontait pas cette histoire aux enfants.
Ainsi, ma Pomme, très fière, répond désormais avec beaucoup d'aplomb : "Chez nous, il n'y a pas de Père Noël"

Mais pourquoi priver volontairement nos enfants de cette magie ?
Voici 10 réponses très personnelles à cette étrange décision...

1. La première raison, majoritairement citée par les autres extra-terrestres dans mon cas, c'est de ne pas souhaiter mentir à l'enfant.
Un jour, forcément, il saura.
Il saura qu'on lui a menti pendant des années, qu'on a abusé de sa naïveté.
Il comprendra que les adultes peuvent mentir.
Et on lui apprendra à mentir (car l'enfant apprend pas imitation...). Parfois même on lui demandera de mentir aux petits frères, sœurs, cousins, cousines.
Dans le cas du Père Noël, c'est un mensonge de société : l'école s'y met, la télévision s'y met, l'ensemble des adultes que rencontrent l'enfant s'y mettent.
Et quand des parents, soucieux de ne pas mentir, expliquent qu'il s'agit d'une belle histoire tout comme les contes de fées, il a naturellement du mal à y croire tant le mensonge est partout.


2. Odieux chantage :
On met donc dans la tête de l'enfant une jolie histoire et de l'impatience car il va avoir plein de cadeaux grâce au gentil Père Noël !
Mais attention, pour ça, il doit être gentil. C'est tellement plus facile de dire "Si tu n'es pas sage, le Père Noël ne t'apportera pas de cadeaux" que de dire "Si tu n'es pas sage, JE ne t'offrirai pas de cadeaux"
Certains enseignants l'utilisent aussi ! J'ai assisté il y a quelques années à une scène qui m'a profondément  perturbée. Dans une classe de maternelle, l'enfant distraite n'avait pas écouté la consigne : au lieu de découper les catalogue pour coller son choix de jouets sur la feuille, elle avait découpé la feuille. L'enseignante, excédée, lui a dit qu'elle n'avait qu'à écouter, et que du coup elle n'aurait pas de cadeaux à Noël (et double peine, elle l'a envoyée dans la classe d'à côté sur une chaise... :/). Évidemment, la petite (3,5 ans) a pleuré à chaudes larmes...
En ne parlant pas du Père Noël à mes enfants, je les libère de ce poids : qu'ils soient sages ou non, le Père Noël ne leur apportera pas de cadeaux !
Et s'ils venaient à l'idée des adultes qui les ont parfois en charge de se servir de ça pour les "dociliser", ça serait un flop assuré !

3. Janvier. Cour de récré.
"-Et toi, il t'a apporté quoi le Père Noël ?
-Un vélo, un i truc machin (j'y connais rien :D, disons une tablette), une couette spiederman, une voiture télécommandée et des entrées pour Disneyland. Et à toi ?
-un bateau playmobil".
Ils ont beau être naïfs au point de croire à des histoires de rennes volants, ils sont déjà capables de faire des comparaisons. Et de percevoir des inégalités. Parents, nous n'avons pas tous le même rapport à la consommation (ni les mêmes moyens) ; il serait tellement plus simple de l'expliquer à nos enfants plutôt que de les laisser penser que ce bon Père Noël, supposé incarné la générosité absolue, puisse être injuste.

4. Autre élément qui me parait essentiel : la notion d'imaginaire.
L'enfant, petit, construit sa perception du réel. Au fur et à mesure qu'il grandit, il fait le tri entre ce qui est imaginaire (les animaux qui parlent, les elfes, etc.) et ce qui ne l'est pas.
Aussi, si on lui raconte la belle histoire du Père Noël en lui présentant comme une vérité, il y croit, sans trop de difficultés car il n'a pas encore fait cette distinction.
Petit à petit, les doutes s'installent : il sait bien que les rennes ne volent pas, il voit bien que le Père Noël de la grande surface est différent de celui qu'il a vu à l'école ou à l'arbre de Noël, il sent que quelque chose "cloche" un peu de temps en temps. Cependant, il a réellement des cadeaux. Et la carotte a réellement été grignotée. Et tout le monde lui affirme que ça existe pour de vrai. Et il a même reçu une lettre en réponse à la sienne. Tant d'intrusions du monde imaginaire dans le réel le perturbe et l'empêche de discerner. Les hypothèses qu'il émet ne sont pas vérifiables. On ne lui laisse même pas la possibilité de découvrir par lui-même le poteau rose.


5. L'argument majeur des "pro" Père Noël, c'est la magie qu'il apporte.
Comme je viens de l'expliquer, l'enfant ne fait pas encore la distinction entre le réel et l'imaginaire.
Si on lui dit que le Père Noël vient dans un traineau qui vole, tiré par des rennes, il y croira. Qu'y a t il de magique à une chose perçue comme plausible ?
Et j'ajoute que Noël, même sans Père Noël, est un moment de grande joie pour les enfants !
Les illuminations, les décorations, la crèche, les automates dans les grands magasins, le calendrier qui permet de décompter les jours, l'attente impatiente de mettre Jésus dans la crèche et d'ouvrir les cadeaux, les bricolages, les odeurs de cannelle, la joie de retrouver les cousins et cousines, l'excitation d'un éventuel voyage... tout cela suffit à illuminer le regard de nos petits !
Et par tout ces aspects, la charge affective de Noël est bien suffisante à gérer pour eux, il ne me semble pas utile ou nécessaire d'en rajouter !

6. Autre point de désaccord entre le Père Noël et moi : le statut du cadeau !
Ici nous cultivons le don, et non le dû. On essaye tant bien que mal d'éviter les listes et les demandes, et de réfléchir à comment faire plaisir à l'enfant en fonction de ses goûts, de ses besoins, tout en lui permettant parfois de découvrir quelque chose auquel il n'aurait pas nécessairement pensé lui-même.
Alors bien sur, il est surement possible de faire cohabiter le cadeau choisi avec soin et le Père Noël, mais ça me semble tellement plus cohérent quand ceux sont les personnes dont l'enfant se sait aimé qui utilisent ce langage de l'amour !
Et comment faire cohabiter ces activités pédagogiques si souvent constatées en maternelle de découpage-collage* de catalogue ? Les enseignants, jouant le jeu du mensonge sociétal, allant parfois jusqu'à remettre aux parents, discrètement, cette lettre soit disant envoyée au Père Noël !


7. Les cadeaux sont donc une façon d'exprimer son affection, un langage d'amour.
Avant Noël, nous fabriquons avec les enfants des petits cadeaux pour les personnes que nous allons voir. Et les enfants sont très heureux de pouvoir offrir, eux aussi, des petits présents.
Ainsi, nous cultivons non seulement le plaisir de recevoir, mais également le plaisir d'offrir.
Bien sur, ces petits bricolages sont compatibles avec le Père Noël, mais c'est nettement plus facile sans... De plus, les enfants sont très heureux de savoir que c'est Mammig qui a offert ce cadeau, ou le parrain de Lys qui a offert celui-ci. Et même si je ne l'exige pas, les enfants ont alors la possibilité de remercier ceux qui les ont gâté.

8. N'avez vous jamais aperçu ce petit enfant dans les galeries des centres commerciaux, hurlant de frayeur sur les genoux de ce monsieur déguisé, avec plusieurs adultes autour de lui cherchant vainement à les détourner de cette émotion en les faisant rire "pour la photo souvenir". Souvenir de qui ? des adultes présents ? Souvenir de quoi ? Du traumatisme vécu ?
Il n'est pas rare que les enfants aient peur du Père Noël. Peur du déguisement et de la fausse barbe (perçue comme un masque). Peur de l'inconnu sur les genoux duquel on les invite à s'asseoir.
Peur également parfois de cette brusque intrusion de l'imaginaire dans le réel. Ne seriez vous pas effrayée si une sorcière (aussi gentille soit elle) arrivait sur un balai ?


9. Enfin, le Père Noël, avec le temps, est devenu le symbole de la société de consommation.
Lorsque j'évoque le fait que nous n'offrons à Noël qu'un seul cadeau, commun à nos trois enfants, on me trouve dure. Et pourtant, il y a bien d'autres choses à transmettre que l'abondance de cadeaux (que les grands-parents, oncles et tantes, parrains et marraines se chargent bien de compléter ;) )!
La joie des retrouvailles, des moments partagés en famille, le repas de fête... les cadeaux ne sont qu'une goutte d'eau au milieu de tout ce bonheur ! Ils ne doivent pas occulter tout le reste !

10. Et pour nous qui sommes croyants, Noël est avant tout la naissance de Jésus. La joie de la fête vient de cet événement, de l’avènement du Christ parmi nous.
Le Père Noël, s'il prend une place trop importante, dénature le sens de cette fête. Chez nous, c'est Jésus la star à Noël ;)



*J'entends d'ici les voix s'élever. Alors oui, on peut dire que d'autres objectifs sont travaillés lors de cette activité : règles de correspondance, langage oral, discrimination et tri, graphisme même si on ajoute un peu d'écrit à recopier... Mais ça ne rend pas l'activité plus pédagogique à mes yeux...

6 commentaires:

  1. Je suis tout à fait contre cette histoire de père Noël également. Les gens trouvent ça souvent étrange et ne respectent pas ce choix (ils en parlent à mes enfants alors qu'il connaissent ma position là-dessus et ils insistent pour que j'adhère au délire). Personnellement, c'est le mensonge qui me gêne le plus dans l'histoire. Il m'arrive de mentir parfois à mon fils (très rarement) mais dans des contextes très particuliers et c'est MA décision, et pas celle de la société (de consommation)…

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  2. Fanny Fannette7 mars 2013 à 13:38

    Tu leur as expliqué comment exactement à ta filles? Je suis d'avis qu'effectivement il s'agit d'un mensonge mais je ne suis pas sûre de savoir expliquer que le Père Noël n'existe pas à ma fille de bientôt 2 ans. J'ai souvent soulevé ce mensonge surtout quand mon petit frère (de 18 ans mon cadet) était en "âge d'y croire". Je me disais "mais quelle horreur, on lui fait croire ça et dans quelques années il verra qu'on lui a menti!".
    ça ne m'a pourtant pas empêché de faire la même chose avec Victoria à Noël dernier... Je n'ai pas abordé le sujet avec mon mari mais après tout à quoi bon leur mentir là-dessus???
    Pour ma part, je ne suis pas pratiquante et je ne crois pas au Père Noël (ah bon?!?) mais j'aime énormément cette fête depuis que je suis maman car c'est un réel moment de partage en famille : on se retrouve, on apprécie être ensemble à l'instant T, je vis ce moment comme une "trêve". C'est ça que je veux transmettre à ma fille, pas un mensonge. Affaire à suivre!

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  3. Bonjour,

    Tout d'abord merci de partager tes réflexions avec nous. J'ai découvert ce blog hier soir, et hop, ce matin, j'y retourne. Je trouve que ta description de Montessori ( sur l'importance de l'ambiance, de l'attitude, plutôt que du matériel) est très bien résumée, très bien amenée, je projette déjà de la faire lire à une amie!

    Pour ce qui est du Père Noël, je suis d'accord avec toi (bien que mon petit loup n'ait qu'un an... et deux jours). Je me pose tout de même la question des Autres... Je ne compte pas déscolariser mon fils, ni le mettre dans une école Montessori (en Belgique, elles sont très très rares et très très chères); si je lui explique ce qu'est Noël et l'arnaque du Père Noël, comment va-t-il réagir à l'école quand on lui parlera de cette histoire? Ne va-t-il pas être mis de côté? j'imagine déjà être convoquée par le directeur :-))) Ou pendant la fête de famille où tous les cousins sont présents (et quieux y croivent)? Doit-on dire à l'enfant de cacher cette révelation?

    As-tu une idée là-dessus?

    Encore une fois, je te remercie chaleureusement de partager ton vécu avec nous et je te souhaite une belle continuation avec ta Pomme, ta Lys et ton Champignon :-) Adeline de Belgique

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  4. Perso, je ne raconterai pas cette histoire à mes enfants, mes parents ne me l'ont d'ailleurs pas racontée et ça ne m'a pas empêcher d'avoir une imagination débordante.
    Le seul problème, c'est que la plupart des adultes ont été initiés dès leur plus jeune age à mentir et à discerner les mensonges. C'est alors plus compliqué pour ceux, non entraînés, de percevoir le mensonge.

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  5. Merci merci merci !!!! Je me retrouve complètement dans ton article ! J'ai une puce de 16 mois et il y a longtemps déjà (avant sa naissance) que je me dis que je n'ai pas envie de raconter cette histoire de père noël comme une vérité...
    Comme d'autre je m'interroge sur la manière de m'y prendre, notamment car ma fille sera scolarisé à l'école (je n'ai absolument pas les moyens financiers de cesser mon activité professionnelle). Si vous avez quelques conseils...
    Je pensais lui raconter l'histoire comme un conte, répondre à ses questions au fur et à mesure. Perso je ne crois pas au Père Noël, et pour moi Noël est toujours un moment magique : les décorations, les lumières, la générosité, les cadeaux, les repas de familles et les retrouvailles, la neige, etc. J'ai envie de partager ça avec ma fille....
    Si tu as des conseils ou des références...
    En tous cas merci pour ton article, et pour ton blog (enfin tes blogs) riche et intéressant ! Ca m'inspire !
    MERCI !
    Céline

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  6. Excellente réflexion même si j'avoue avoir raconté cette histoire à mon fils... Tu parles de croyance, d'imaginaire,...excuse moi mais tu parles aussi de Jésus... Au risque de choquer tous ceux qui sont d'accord avec toi...les dieux sont également des croyances, non?

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